Cèngkok

Cèngkok est une pièce pour flûte solo en forme de spirale : une mélodie, d’abord jouée en sons percussifs peu évocateurs de la flûte, est répétée tout au long de la pièce, mais de plus en plus lentement, jusqu’à ce que chacune de ses notes, au début très courtes et rapides, soit séparées de plusieurs secondes.
À chaque fois que cet espace entre les notes s’agrandit, les notes de la phrase précédentes sont conservées, mais il est possible de les ornementer avec une nouvelle phrase — les notes de la mélodie rapide d’origine deviennent ainsi simples buts à des formules cadentielles, mais ces dernières ne l’atteignent pas toujours directement, arrivant parfois un peu plus tôt, parfois enjambant la note cible. À chaque fois, les formules ajoutées apparaissent avec un nouveau timbre de flûte, de plus en plus proche du timbre chantant habituel, jusqu’à le dépasser dans de résonnants sons multiples (multiphoniques).
Le dernier des six cycles présente ainsi un enchevêtrement complexe de timbres et de formules mélodiques dirigées vers les mêmes notes pôles, comme si plusieurs modèles différents de flûtes jouaient ensemble.
Le terme céngkok à au moins deux sens : c’est d’une part le nom donné à ces formules mélodiques cadentielles, c’est-à-dire orientées vers une fin, qui constituent le répertoire des instruments solistes (viole, voix, flûte…) des orchestres de percussions indonésiens appelés gamelan, il désigne d’autre part l'art de la conduite mélodique.
La pièce est composée pour et dédiée au grand flûtiste Michaël Faust, rencontré lors de ma participation à la résidence Gargonza Arts en 2014, dont le soutien constant est essentiel et inspirant.