Etude en blanc n°2
pour piano solo
ISMN : 979-0-2325-6381-7
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Dans cette "Etude en blanc n°2", « Elégie » en hommage à Maurice Ravel, j’ai souhaité ré-investir non pas la grammaire propre à un compositeur (langage harmonique, motifs thématiques ou rythmiques, « manières »…) mais plutôt le substrat, l’empreinte que pouvaient laisser, parfois de longues années après, le travail et l’interprétation des œuvres de Maurice Ravel, dans les doigts d’un pianiste, dans le cœur d’un musicien, dans la mémoire d’un compositeur.
Point ici de citation, mais plutôt une idée fixe, presqu’une obsession, qui est née librement sous les doigts en évoquant non pas une œuvre en particulier, mais plus un caractère né de la rencontre rythmique des Jeux d’eau, de la poésie sombre de Gaspard de la nuit, de la fantaisie des Miroirs…
Cette obsession prend possession du piano en contaminant tout le spectre sonore, puis en débordant (semble-t-il) le pianiste lui même, dans une progression fragmentée où les phénomènes acoustiques de l’instrument, comme chez Ravel, sont mis en exergue.
Dans un second temps, l’étude prend un tournant plus pointilliste lorsque la principe de déconstruction atteint son apogée; comme chez le compositeur auquel elle rend hommage, l’ « Elégie » devient redoutable non dans son apparente virtuosité mais plus dans ce temps inéluctable où le timbre se déforme, où le caractère funèbre prend le dessus, où les modes de jeux mêlant à la fois jeu sur le clavier et dans les cordes créent un nouvel univers acoustique. Dans cet univers, la présence du sentiment initial, de l’obsession de début, n’est pourtant pas si lointaine que cela, émergeant de temps en temps sans que l’on s’y attende jusqu’à la fuite éperdue finale.
Ces 6 Etudes en Blanc, dont l’ « Elégie » est la seconde, est un corpus très important dans ma production musicale, à plusieurs point de vue, marquant un tournant et en même temps un engagement fort.
Le projet global est simple : écrire chaque pièce, pensée non comme une étude technique mais bien un poème symphonique pour piano à la manière des grandes études de concert de Liszt, pour un pianiste particulier, en tenant compte de ses choix de répertoire, son interprétation, son univers musical personnel et travailler de concert avec lui ou elle la partition. L’idée est au final de produire un concert avec les 6 pianistes différents, se relayant sur scène, trois sur un piano « classique », trois sur le « piano hybride » que j’ai développé depuis quelques années pour d’autres œuvres.
Le second engagement de ce corpus est d’ordre plus politique. Là encore, me rappelant la manière du XIXème siècle où le piano servait, dans les salons, à la diffusion des opéras ou des symphonies (là encore, citons Franz Liszt et ses nombreuses transcriptions, ses paraphrases, et autres…), je me suis imaginé pouvoir ainsi contrer un phénomène hélas trop présent actuellement et avec lequel nombre de compositeurs d’aujourd’hui ont à transiger : celui de l’immédiateté de la création, de la nouveauté à tout prix. En effet, la priorité aujourd’hui est donnée au "one shot", donc à la « production de masse » d'œuvres inédites, souvent montées en peu de temps, plus qu’à la reprise et à l'approfondissement d'œuvres déjà jouées. Mon cycle "Etudes en blanc" est tout l’inverse : chaque étude reprend, développe, ou est écrite en lien avec une oeuvre pour orchestre, ensemble, ou d’instrumentation différente, de mon catalogue. Parfois, comme c’est le cas pour « Elégie », elle précède l'œuvre orchestrale. Quoi qu’il en soit, l’idée est de revenir à une manière simple de diffuser la musique, de faire vivre et voyager une idée musicale sans le support technologique moderne, comme un retour aux sources.
Enfin, le titre « Etudes en Blanc » vient de ce que chaque pièce comporte un ou plusieurs paramètres (musical, littéraire ou philosophique) laissé à la complète liberté de l’interprète. Alors que la première, "Heart Mechanics", laissait une totale création des dynamiques au pianiste, dans une pédale infinie, il s’agit dans la seconde de la gestion du temps musical en lien avec l’acoustique de l’instrument. Il s’agit également de la manière dont l’interprète joue avec la mémoire de l’auditeur en montrant ou cachant certaines choses, en faisant entendre le silence toujours différemment (un silence toujours peuplé de résonances, de partiels à moitié étouffés, de « fantômes musicaux »).
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